Bonjour,
Vous dites que les maigres salaires des petits hôpitaux de province ne vont attirer que les médecins étrangers. J’ai été soignée justement un jour en déplacement dans un de ces petits hôpitaux par un médecin africain très compétent et par des infirmières étrangères aussi, ils ne parlaient pas un français parfait mais étaient professionnels et aimables, alors en quoi est-ce un problème ?
Je vous fais part de mon ressenti de patient bien sûr, mais je suis depuis quelques temps les doléances des médecins dans les médias, je voulais plaider un peu la cause des "français moyens" qui se sont pris la crise en pleine figure depuis des années, qui ne sont pas assez pauvres pour toucher la CMU et trop pauvres pour payer des dépassements d’honoraires.
Je fais le même métier que mes parents, mais mes proches et moi vivons beaucoup moins bien qu’eux dans les années 80, nos logements sont plus petits, nos sorties sont plus restreintes, nos vacances carrément rares, une fois qu’on a payé le loyer, le gaz, l’électricité, les assurances, il reste juste de quoi acheter de la nourriture relativement saine, du shampoing, dentifrice et de quoi être habillé proprement.
Les médecins ont souvent comme arguments que les patients payent bien 100 euros une facture de plombier (un homme rustre qui n’a pas fait d’études), dépensent pour leur bagnole ou leur écran plat, que leurs amis qui ont fait HEC ou l’X gagnent beaucoup qu’eux qui ont fait 12 ans d’études, etc.
Je n’ai pas de smartphone, je fais les réparations et le bricolage moi-même, et je ne connais personne parmi mes proches ayant fait appel à un plombier dans sa vie (les fiches Castorama suffisent largement).
Et les parents qui préfèrent s’acheter des gadgets technologiques plutôt que payer des médecins pour soigner leurs enfants sont une infime minorité maltraitante, j’ai des amis qui ont une enfant handicapée, tout leur budget lui est consacré.
Pour moi payer un dépassement d’honoraire élevé est un luxe (ma mutuelle (qui me coûte cher pourtant) ne rembourse pas les dépassements du secteur 2), ce luxe je me le suis offert quand j’ai dû me faire opérer pour un pépin de santé, parce que je n’ai pas trouvé de spécialiste conventionné secteur 1 (libéral ou à l’hôpital) qui puisse me prendre avant six mois.
Il faut que les médecins, qui viennent souvent de milieux aisés, prennent conscience que les "français moyens" sont devenus pauvres par rapport aux décennies passées, qu’ils se serrent le ceinture, et que ce n’est pas qu’ils ne veulent pas, mais bien qu’ils ne peuvent pas payer des consultations chères.
Il faut garder le sens des réalités : un consultant qui a fait une Grande Ecole ou un avocat d’affaire a comme clientèle des entreprises millionnaires, un médecin a comme clientèle les habitants de son quartier.
Quant aux fameux plombiers ou garagistes, je peux vous assurer qu’eux et leurs enfants ont un train de vie très inférieur à tous les simples généralistes (je le constate parmi les élèves).
Alors je sais que ma position va sûrement vous paraître béotienne, mais pourquoi justement ne pas faire venir des médecins étrangers , pour qui le "maigre salaire" que vous évoquez sera toujours supérieur au salaire du pays d’origine ?
Les médecins français menacent toujours de s’exiler en Suisse ou aux Etats-Unis (ce qui est amusant quand on y a vécu et qu’on connait l’opinion des Américains sur les Français) en disant "bien fait pour les malades français radins ils n’auront plus personne pour les soigner", et bien je vous assure que la plupart des malades pauvres ne verraient aucun inconvénient à être soignés par des étrangers.
Dans les pays d’économie de marché le recours à l’immigration a toujours eu lieu pour les secteurs en crise, pourquoi pas pour le secteur médical, de très nombreux médecins sont candidats à l’émigration.
La crise n’a épargné presque personne, les revenus ont baissé, les jeunes générations ne bénéficieront pas des salaires de leurs aînés, les jeunes médecins non plus.
Je vous remercie si vous avez pris la peine de lire ce pavé, qui vous semblera probablement plein d’inepties, mais il s’agit d’un point de vue de "patient moyen" !
Cordialement, (...)