On peut aborder le problème sous plusieurs angles, mais, fondamentalement, l’idée qu’il serait licite de faire courir un risque, le moindre risque, à des jeunes filles de 11-13 ans en parfaite santé, pour obtenir un bénéfice on ne peut plus hypothétique et qui ne se manifesterait, s’il se produit un jour, qu’au-delà de l’âge de 40 ans, me paraît absolument contraire à la déontologie médicale et au serment d’Hippocrate.
Un angle pertinent pour traiter le problème me paraît être celui-ci. Il faut se poser la question de savoir si la décision de généraliser ce vaccin à toutes les jeunes filles correspondait à une stratégie cohérente de santé publique pour lutter contre le cancer du col.
La réponse est indéniablement NON. D’un pont de vue de santé publique, la décision de généralisation de ce vaccin est totalement irrationnelle. Et il découle directement de ce raisonnement une évaluation de l’intérêt individuel de cette vaccination
Pourquoi ?
D’une part, parce que les cas de cancer du col et les décès qui y sont liés, sont en diminution constante et rapide depuis plusieurs décennies en France d’après les données de l’INVS. Ainsi, la mortalité cumulée (risque total cumulé pour une femme de mourir par cancer du col pendant toute sa vie) a été divisée par six en 40 ans passant de 3,6 % pour les femmes nées en 1910 à 0,6% pour les femmes nées en 1950. Plus de 95% des décès surviennent après 40 ans. Actuellement, la mortalité estimée est de 800 cas (dernières estimations) pour 220 000 décès féminins par an en France alors qu’elle était de 1215 en 2000, soit UNE DIMINUTION, EN DEHORS DE TOUTE VACCINATION, DE 30% EN UNE DIZAINE D’ANNEES.
Pourquoi cette diminution ? Moindre promiscuité due à une plus grande conscience du risque de maladies sexuellement transmissibles graves comme le SIDA, utilisation plus fréquente du préservatif... et sans doute aussi le dépistage du cancer du col par frottis.
Le dépistage par frottis est efficace pour diminuer la mortalité liée à ce cancer, des études l’ont démontré. Mais, en France, le dépistage est seulement recommandé et laissé à l’initiative des femmes, ce qui en diminue l’efficacité, un certain nombre de femmes se faisant dépister trop fréquemment, on parle alors de surdépistage, tandis que celles qui en auraient le plus besoin ne font pas de dépistage.
Le remède serait simple : instaurer un dépistage organisé, comme cela a été fait pour le cancer du sein alors que le niveau de preuves d’efficacité était pourtant bien moindre pour ce cancer.
Un dépistage organisé est un dépistage où l’on invite périodiquement les femmes à se faire dépister. Dans le cas du cancer du col on a défini une fréquence idéale qui serait de faire le dépistage tous les trois ans. Les études faites en population dans les pays scandinaves ont montré un parfait parallélisme entre le taux de participation au dépistage organisé et la diminution de la mortalité par cancer du col. Cela ne coûterait pas plus cher qu’actuellement, seulement le coût de l’organisation, car le nombre de frottis serait le même, à peu près, qu’actuellement, où une partie de l’ensemble des femmes pratiquent le dépistage trop souvent.
Voilà les données du problème en termes de santé publique.
Or, quelles sont les conclusions du groupe de travail qui avait été chargé d’examiner la question de l’intérêt, économique entre autres, de la vaccination par le vaccin contre le papillomavirus ?
Le groupe de travail s’est fondé sur une modélisation de type mathématique et il a conclu qu’ON POUVAIT ESPERER UN BENEFICE SUPPLEMENTAIRE SUR LE NOMBRE DE CAS DE CANCER DU COL DE 16% (c’est-à-dire une diminution supplémentaire de 16% des cas de cancer, on ne parle pas de mortalité) DUVACCIN PAR RAPPORT AU DEPISTAGE ORGANISE. MAIS QUE CE BENEFICE SUPPEMENTAIRE N’APPARAITRAIT QUE DANS 70 ANS. De plus, ce maigre bénéfice ne pourrait être observé que si trois conditions irréalistes se réalisaient :
1- il faudrait que le vaccin maintienne le maximum d’efficacité qui lui est attribué, de 70%, pendant 70 ans
2- que le taux de vaccination des jeunes filles soit au minimum de 80% pendant 70 ans
3- que le vaccin ne nécessite aucun rappel
Si une seule de ces conditions n’était pas remplie, on ne pourrait espérer aucun bénéfice supplémentaire de la vaccination par le vaccin contre le papillomavirus par rapport au dépistage organisé, malgré son coût exorbitant et les risques qu’il fait courir à des jeunes filles en bonne santé.
Ergo.
Je ne peux pas développer toute l’argumentation ici, mais je renvoie à l’article que j’avais écrit chez docteur du 16 http://docteurdu16.blogspot.fr/2011/10/gardasil-des-precisions-supplementaires.html (...)