Bonjour à tous,
Je ne voudrais surtout pas que ce message soit un frein à l’arrêt du tabac pour qui que ce soit. Il ne retrace que mon expérience, mais depuis le temps que je me promets de vous parler de ce qui ne va pas, j’ai décidé aujourd’hui de me jeter à l’eau (sans doute parce que ça va un peu mieux et que je suis enfin capable de le faire).Après de multiples tentatives avortées depuis trois ans, j’ai entamé mon dernier sevrage il y a un peu plus de 4 mois, sans beaucoup plus de conviction quant à ma réussite que les autres fois d’ailleurs. Comme l’idée du « plus jamais » m’angoissait, je me suis plutôt dit « un jour après l’autre, c’est toujours ça de gagné ». Seulement très vite, l’odeur de la clope m’est devenue insupportable, moi qui l’ai toujours aimée, même enfant, même enceinte, même en sevrage. A tel point que mon fumeur de mari a été obligé d’émigrer sur le balcon .
Bref, sans filet nicotinique (je suis allergique aux patchs et les chewings-gums et pastilles m'ont toujours paru infects) mais avec un surdosage de forum, de chewing-gums et de chocolat, je me suis retrouvé dans un sevrage « facile » : très peu d’envies, pas de sautes d’humeur, pas d’insomnie, juste des kilos encore et toujours. Au mois de février, dans l’atmosphère enfumée d’un casino, j’ai eu envie d’en chiper une à mon mari : pas fumée en entier, dégueulasse.
Et puis, brusquement, alors que je vis depuis des mois un stress professionnel assez pesant, j’ai « pété les plombs ». Une énorme crise de larmes en public et l’obsession de rentrer chez moi, de m’enfuir. J’ai pleuré toute la soirée, j’étais incapable d’y retourner le lendemain. Mon médecin m’a arrêtée une semaine et m’a tout d’abord prescrit du lexomyl tout en me faisant faire un bilan sanguin car je ressentais des douleurs aussi diverses que variées (intestins, articulations, migraines…). J’ai passé une semaine à pleurer et à surfer sur internet en partie ici, en partie à la recherche d’infos sur la dépression, en partie aussi beaucoup à enquiquiner tous mes copains virtuels sur MSN ou dans leur bal (qu’ils soient tous infiniment remerciés de leur patience, vous savez que vous pouvez tous compter sur moi pour vous renvoyer l’ascenceur).
Je suis donc retournée comme convenu voir mon médecin, toujours en pleurant (les actions ont dû grimper chez kleenex ces derniers temps) : les analyses étaient normales, ma fatigue était intense et je suis retournée au boulot contre son avis (il ne me restait plus que deux jours à tenir avant d’être en vacances). Il a rajouté du prozac à l’ordonnance et moi qui ai toujours fui ce type de médicaments comme la peste, je peux vous dire que j’étais tellement mal que je suis depuis très scrupuleusement sa prescription.
Vacances donc plus de stress professionnel, mais toujours des crises de larmes, moins fréquentes, mais toujours aussi irrépressibles et une fatigue, une fatigue comme je n’en ai jamais ressenti. Des mots qui se cognent dans ma tête, à me faire hurler, mais que je ne peux pas dire, parce qu’ils sont indicibles. Je dois dire que j’ai beaucoup inquiété mes proches.
Nouvelle consultation au bout de trois semaines : je dis à mon médecin que je ressens une terrible fatigue sans aucune cause (sous-entendu : est-ce que les médicaments ne me feraient pas dormir ?). Réponse sans appel : si, il y a une cause évidente à votre fatigue, vous êtes déprimée, c’est tout. Je lui fais part de mes craintes de passer de la dépendance tabagique à une dépendance pharmacologique et il me rassure en me disant que mon traitement s’étalera sûrement sur plusieurs mois, mais qu’un jour on arrêtera les médicaments. Je lui explique que je suis assaillie par des idées que je n’arrive pas à exprimer, par un regard sur ma vie que je n’ose pas affronter et il me donne les coordonnées d’un psy.
Pareil, j’ai longtemps été assez réticente devant les « déprimés qui ont tout pour être heureux », or, j’ai moi-même vraiment tout pour être heureuse, du moins plus que la plupart des gens. Il n’empêche, cette souffrance qui ne semble pas avoir de cause objective, je sens aujourd’hui que j’ai besoin d’en parler et que, ni mon entourage, ni mon généraliste ne peuvent être à même de m’écouter. Je n’ai pu avoir de rendez-vous qu’à la fin du mois, mais effet des médicaments ou soulagement d’avoir enfin accepté de me faire aider, je me sens malgré tout beaucoup mieux : je suis toujours aussi fatiguée, je ne fais que le strict nécessaire, mais j’arrive à me mettre en colère au lieu de pleurer, ce qui, certes, soulage sur le moment, mais ne permet pas de se poser autrement qu’en victime.
Je suis loin d’être tirée d’affaire, je le sais, mais je sais aussi que le « rideau de fumée » qui me permettait de dissimuler un certain nombre de choses dans ma vie s’est aujourd’hui levé, qu’il va falloir maintenant que je les regarde en face pour retrouver un autre équilibre. Je vis à la fois une nouvelle naissance, une nouvelle adolescence, mais je me dois de préserver ce qui dans ma vie est construit et ne nécessite pas d’être détruit. J’ai bon espoir que le jeu en vaille la chandelle. En tout cas, une chose est sûre, je n’ai plus du tout envie de fumer…
Balzy