Bonsoir, ma réflexion se nourrit, à lire les nouvelles interventions pour comprendre ce qui est en jeu dans le rejet des médocs (et donc tenter de comprendre comment « négocier » avec ces motivations pour favoriser le soin…)
Quelque chose qui me paraît très important, c’est de souligner que la logique de la personne qui rejette les traitements psychotropes n’est pas une logique « de fou » ; elle n’appartient pas spécifiquement à des malades mentaux ; je la vois très régulièrement autour de moi, chez des gens très raisonnables, très courageux, très volontaires pour améliorer leur vie (même si je pense qu’ils sont dans l’erreur sur ce point précis). (Je l’ai vécue moi-même, avec des anti-dépresseurs - même si je suis loin de posséder leurs vertus J)
Je crois qu’il est essentiel, vital pour toute personne humaine de pouvoir se référer à un sentiment de soi d’une part, de faire confiance à ses perceptions, ses pensées d’autre part. Car notre psychisme est organisé sur la capacité à contrôler notre vie – comprendre l’environnement, agir sur lui. C’est une « croyance de base » sans laquelle on s’effondre. C’est donc un réflexe de survie mentale, un instinct de santé.
(Je pense aussi que l’énergie immense que mettent les personnes en délire pour créer une cohérence entre leurs perceptions et leur connaissance « classique » du monde s’assimile à une lutte pour trouver du sens, pour ne pas être fou en somme…)
La peur de « ne plus se reconnaître », d’être modifié par ces substances qui court-circuitent notre traitement de l’information, tout le monde l’a – sauf à avoir expérimenté qu’on peut moins souffrir sans être « autre » dans sa personnalité, dans sa perception de soi.
J’ai vécu ça avec les anti-dépresseurs : ne pas pouvoir imaginer que quelque chose me change – en restant moi-même. (Paradoxe : je désirais ardemment changer… Mais par une méthode « bio » pourrait-on dire, une méthode que l’on peut assimiler à soi, à son organisme.)
J’ai des proches qui résistent toujours farouchement aux traitements médicamenteux de leurs angoisses et/ou dépression et/ou insomnies graves. Pourtant, alors qu’ils ont des croyances plutôt scientifiques dans l’ensemble, ils tentent le coup d’innombrables et plus ou moins folkloriques pratiques alternatives (efficaces à tout le moins par la vaste vertu du placebo !) pour résoudre leurs maux J.
Ils ont peur de n’être plus « maîtres à bord » en somme, et c’est parfaitement légitime…
Je crois que ça pourrait être un moyen pour maintenir ouverte la communication au sujet des médicaments, avec des personnes souffrant de troubles schizo qui n’ont pas encore expérimenté au long cours le traitement et ne peuvent alors se fier à leurs constatations : manifester qu’un terrain d’entente existe, à propos de cette logique de maîtrise et d’identité. Tenter ensemble de trouver leur marge de manœuvre avec la chimie et la psychothérapie en respectant cette exigence fondamentale de « rester soi », de pouvoir « se faire confiance ».
A bientôt
Patricia