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"coupable,mais de quoi?"

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Forum : Schizophrénie (Protected)
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taninou (0 messages) Envoyer message email à: taninou Envoyer message privé à: taninou Voir profil de ce membre Voir addresse IP de cet auteur
11-05-04, 22:21  (GMT)
"coupable,mais de quoi?"
Bonjour a tous!
J'ai attentivement lu votre charte,et plusieurs messages avant de me décider à vous faire part de mon témoignage.J'ai tout de meme peur de "déborder",et de faillir à vos recommandations,aussi,je vous prie de m'avertir si mes propos deviennent choquants,ce sera un plus pour mes prochains messages.
Voici bientot deux ans,à la suite d'une T.S.,j'ai rencontré mon copain dans un hopital psychiatrique,qui,lui,était là,suite à une crise aigue(précision:il a été diagnostiqué comme étant schizophrène).On est sorti ensemble,et cette prison qu'était l'hopital est devenu pour moi un havre de paix et de sérénité.Je suis sortie quelque temps avant lui,non sans avoir appris au passage que personne ne l'attendrait une fois qu'il serait dehors,qu'il n'avait nul endroit ou aller,et qu'il était désespérément seul,ses parents ne voulant en aucun cas entendre parler de lui.
J'ai donc pris la décision de venir le chercher,et de l'accueillir chez moi,dans mon petit studio que mes parents me louaient.J'avais 19 ans,n'étais pas encore amoureuse de lui,étais révoltée par sa situation,prete à l'aider et à tout faire pour lui trouver sa place dans la société.Sans en informer mes parents,étant de surcroit sous antidépresseurs et anxiolytiques(de fortes doses),je l'ai donc logé,nourri,le couvant comme une mère poule,l'assistant,ou plutot,le dirigeant dans toutes ses inextricables démarches administratives,qui ont duré deux mois.
Lui,était sous neuroleptiques,complètement amorphe,et se laissait faire,ne nourrissant pas de méfiance à mon égard,m'ayant vue,comme lui,à l'hopital.Ca a d'ailleurs été le facteur qui l'a fait accepter mes conditions:prendre ses médicaments,ne pas fumer de cannabis,ne pas boire d'alcool.
Nous avons donc vécu ainsi,nous soutenant et nous réconfortant l'un l'autre,pendant 6 mois,sommes devenus amoureux.Nous avons arreté ensemble nos médicaments,nous sentant mieux,car aimés et aimant.Il a trouvé un travail,j'ai continué mes études,et avons eu une vie tout a fait normale pendant un an(on habitait ensemble).La vie était belle,nos problemes nous paraissaient loin.
Mais je n'ai malheureusement pas vu venir sa rechute,ou plutot,n'ai pas voulu la voir.Il s'est remis à fumer de temps en temps,à devenir paranoiaque,à raconter des histoires complètement loufoques,à avoir un comportement de plus en plus étrange.J'ai finalement voulu le convaincre,à maintes reprises,d'aller voir son psychiatre,mais j'ai tellement insisté que le pire est arrivé:il a fait une très grosse crise de délire,m'a accusée de tous les maux,m'a menacée avec un couteau,puis a failli défenestrer mon chien.S'est ensuivie une course poursuite de 4 heures dans la rue,moi voulant partir,fuir,puis ayant en meme temps peur qu'il se fasse du mal,se jette sous les rames du metro.Nous sommes revenus à la maison,il m'a à nouveau menacée,et là,ayant trop peur de lui,je me suis enfuie avec mon chien.Je me suis résolue à appeler urgence psychiatrie.Ils sont arrivés à temps,car après avoir mis mon studio sens dessus dessous,il attaquait d'y mettre le feu.
Je ne sais si je fais bien de vous raconter par le menu cette crise,mais c'est pour vous expliquer que je ne m'y attendais pas,pensais etre la seule personne en qui il ait confiance et à qui il ne ferait jamais de mal.Je me suis lourdement trompée,et ai mis toute une nuit avant de me résoudre à signer l'HDT,terme qui pour moi était synonyme de prison,tout ce que j'abhorrais.Moi qui pensais ne jamais avoir à signer une telle horreur,qui signifiait privation de liberté et déshumanisation totale de l'individu,je me suis vue le faire,m'y sentant obligee.
Obligee,pourquoi?D'une part,devant l'insistance de ma famille,qui craignait pour ma sécurité,devant celle des médecins,puis,je m'en suis rendue compte après,parce que la pitié n'etait plus de mise:c'etait lui ou moi,et nous n'étions plus sur un pied d'égalité.C'était lui le malade,pas moi.Je pouvais décider pour lui,lui n'avait pas droit à la parole.
Quelle valeur a la parole d'un etre qui en menace un autre,qui n'a pas de propos cohérents,et représente un danger pour les autres et surtout,pour lui-meme?Difficile de répondre à ca,tout individu ayant les memes droits qu'un autre,chaque parole étant importante,ayant son importance,en soi...
C'est là que j'ai compris que si ma tante a signé l'H.D.T.,suite à ma T.S.,c'est qu'elle n'avait quelque part pas le choix,bien que je lui reprochasse le contraire.
Mon amour,lui,bizarrement,ne m'en a pas voulu plus que ca.
Mais une fois sorti,bien que dans un premier temps,il soit revenu chez moi,je savais que je n'aurai ni la force,ni le courage,ni l'abnégation nécessaire pour le soutenir comme je l'avais fait la première fois,alors que paradoxalement,on pourrait penser que j'étais plus à meme de le faire,n'étant sous l'emprise d'aucun médicament,et donc,allant mieux qu'avant.
Oui,mais justement!Parce que j'avais repris confiance en la vie,je ne voulais pas la perdre,et mon "instinct de survie" a pris le pas sur l'amour que j'éprouvais pour lui.La peur et l'incompréhension se sont progressivement et sournoisement insinuées dans mes sentiments pour lui. Jusqu'a présent,je ne sais plus si ce qui me rattache encore à lui est la nostalgie des moments passes et la pitié,la peur de le voir attenter à ses jours,ou alors,cet amour qui nous a fait surmonter bien des obstacles.
A l'heure ou je vous parle,je suis au Maroc,mes parents ayant d'autorité décidé que je devais rentrer à la maison,et couper court à ma relation avec lui.
Cet homme avec qui j'ai partagé tant de choses,qui m'a tant aidée et soutenue lui aussi,qui était "normal" pendant un an,vit désormais à la rue,n'a pas d'argent,se nourrit à peine,garde pourtant tout le temps son portable sur lui,attendant que je l'appelle,car,n'ayant pas le courage(encore une fois)de lui dire que tout était fini,je l'ai assuré que je reviendrai en France et ferai ma vie avec lui,tout en n'y croyant pas moi meme.On se parle tous les jours au téléphone depuis trois semaines,il a fait une tentative de suicide,il n'a plus personne pour l'aimer,le soutenir.
Et je m'en veux,je m'en veux tellement!J'aurai tellement voulu l'aimer au point de tout faire pour qu'il aille mieux!J'aurai tellement voulu avoir foi en sa "guérison"!J'aurai tellement voulu avoir la force de rester avec lui,quoi qu'il arrive,quoi qu'il fasse,qu'il dise!
Mais voilà:son comportement,son visage,ses mimiques,ses propos,ont tellement changé que je ne le reconnaissais plus,et ai meme pensé ne l'avoir jamais réellement connu.Je savais que ce n'était pas vrai,que c'était sa maladie qui avait pris le dessus sur lui,qui l'avait transformé au point de ne plus me reconnaitre,de voir en moi une étrangère dont il fallait se méfier,et pourtant...
Lorsque j'ai voulu en parler à son père,pensant qu'il prendrait le relais,veillerait sur lui,du moins a distance,subviendrait à ses besoins,s'inquièterait du fait que son fils puisse constituer un danger pour lui-meme et etre amené à vouloir se suicider,savez-vous ce qu'il m'a répondu?Il m'a dit :"Mais il faut penser à vous protéger,vous!Qu'il se fasse du mal à lui-meme,pourquoi pas,mais pas aux autres!Ce n'est pas mon fils,il est fou!Je le tuerai pour ce qu'il a fait,pour avoir fait souffrir tant de gens!Il n'a qu'a travailler et se débrouiller tout seul,je ne vais pas perdre mon temps et mon argent à l'aider,car après tout,il l'a mérité!"
Mais que peut-on reprocher à quelqu'un qui n'est pas lui-meme,qui est littéralement hors de lui,qui est rongé par une maladie qu'il n'a pas demandé,par une maladie dont il souffre plus que quiconque???
De quoi est-il coupable?Peut-on vraiment le tenir pour responsable de ses actes?N'y a t'il pas de structures qui puissent l'aider,ne serait-ce que temporairement,le temps qu'il lui faudra pour revenir à la morne réalité?
Pouvez-vous m'expliquer pourquoi ma conduite envers lui a été si lache,alors que je suis sensée l'aimer plus que tout??
J'ai honte de moi,mais,en meme temps,sais que j'aurai sombré avec lui.
Est-ce-que vous pensez que je devrai lui dire qu'on ne pourra plus jamais vivre ensemble,ou dois-je continuer à lui mentir,de peur qu'il n'ait plus rien à quoi se rattacher,en quoi espérer,qu'il soit poussé à se suicider?
Je suis désolée,mon message est,je m'en rends compte,bien trop long.Certains passages n'ont certainement pas à figurer dans le texte,mais je n'arrive pas à trier,car pour moi,tout est important.
Dites moi quels sont les propos à ne pas tenir,et je vous promets qu'ils n'y figureront pas dans mon prochain message.
Merci infiniment de me lire,et peut-etre aussi,de m'apporter certaines réponses.
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  Liste des réponses à ce message

  Sujet     Auteur     Posté le:     ID  
 RE: coupable,mais de quoi? horizon 12-05-04 1
 RE: coupable,mais de quoi? Felipe 12-05-04 2
 RE: coupable,mais de quoi? sergi 13-05-04 3

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Texte des réponses

horizon (23 messages) Envoyer message email à: horizon Envoyer message privé à: horizon Voir profil de ce membre Voir addresse IP de cet auteur
12-05-04, 07:41  (GMT)
1. "RE: coupable,mais de quoi?"
bonjour Taninou, lire votre message m'a donné la chair de poule car cela m'a fait revivre mon histoire avec mon mari. N'ayez pas honte après que mon mari m'ait donné un coup de couteau je suis partie, c'est son frère qui m'a appelé et m'a dit si tu ne viens pas le rechercher il repart définitivement au Maroc et comme on venait d'avoir un enfant et que je l'aimais j'ai pris soin de lui et j'ai essayé de lui refaire confiance mais il a décidé que nous devions mourir tous les trois et il a voulu mettre le feu à la voiture je me suis enfuie et j'ai appelé la police ils l'ont arrêté et l'ont hospitalisé d'office. J'ai sauvé ma peau et c'est normal, je ne sais pas si à cette époque c'est notre fils qui m'a fait résister à cette peur de lui et à m'accrocher à une guérison mais bon c'était il y a 12 ans et nous sommes toujours ensemble. L'hospitalisation d'office est parfois reprochée au début je pense mais les personnes qui souffrent et qui vont mieux ensuite sont tout à fait capables de comprendre notre acte. En revanche je pense que vous ne devriez pas lui mentir sur votre vie future ensemble car il est fragile ; la vérité il peut la comprendre vous pouvez rester en contact téléphonique amical pour qu'il se sente moins seul. Vous ne devez pas vous sentir coupable ou responsable de sa souffrance, vous n'y pouvez rien. Et vous n'allez pas lui mentir indéfiniment. Si vous préférez arrêter votre relation il ne faut pas en avoir honte, c'est tellement difficile à gérer mais l'honneteté à son égard me semble primordiale.
Bon courage Horizon
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Felipe (634 messages) Envoyer message email à: Felipe Envoyer message privé à: Felipe Voir profil de ce membre Voir addresse IP de cet auteur
12-05-04, 07:41  (GMT)
2. "RE: coupable,mais de quoi?"
Bonjour Taninou,

Ce que tu racontes montre a quel point l'amour n'a pas de prix. Car tu l'aimes, cet homme. Plus comme avant, mais tes sentiments pour lui te poussent a lui venir en aide. Il est normal, apres ce que tu as vecu avec lui dernierement, que tu ne veuille plus lui donner ton amour. C'est traumatisant et il n'est pas a meme de te rendre heureuse. La patience a des limites, surtout quand elle s'accompagne de tant d'efforts pour arranger la situation. Finalement, je crois que ton message aurait sa place dans mon post concernant la sexualite, car au fond, ce que je recherche, c'est un amour eternel. Merci pour ce temoignage.

Lui, n'est plus capable de s'aimer, probablement. Il a besoin d'aide, en effet. Le probleme, c'est qu'en cas d'urgence ( et dans son cas je pense ), c'est qu'on a surtout besoin d'assistance. L'amour vient apres. On en a toujours besoin, bien sur ! Mais il doit d'abord accepter l'aide d'autrui, car c'est aussi accepter sa presence parmi nous tous. L'amour est parfois un refuge. Ce n'est pas un mal en soit. Mais il ne faut pas qu'il devienne une prison. Il n'a plus que toi dans sa vie, c'est important. Tu devrais lui dire la verite, a un moment propice. Ses illusions pourraient lui faire beaucoup de mal et le temps n'arrange rien a l'affaire. Plutot que de lui dire que tout est fini avec lui, tu pourrais lui dire que tu l'aime autrement, qu'il compte pour toi ( car c'est la verite ) mais que ta vie est ailleurs, desormais. Il va mal le prendre, c'est evident. Mais tu ne pourras pas lui mentir eternellement !
Dans cette perspective, il faudrait que tu sois proche de lui et qu'il accepte l'aide d'autrui ( medecins, services sociaux... ). Si ce n'est pas le cas, c'est plus delicat. Soit tu decides de l'aider a nouveau, et tu te rapproche de lui, en restant honnete mais en essayant de lui redonner confiance en lui, soit tu decides de " refaire " ta vie et le mieux, selon moi, est de l'oublier. C'est terrible ce que je dis. Mais c'est peut-etre le seul moyen pour toi de poursuivre ta vie. C'est un peu comme un deuil. Il faut penser a soi, ou trouver quelqu'un qui pourrait l'aider.

Les choses se tassent avec le temps. Les siennes aussi. Tu crains qu'il ne se suicide ? Tu sais qu'il n'a pas de parent pour lui venir en aide ? C'est tragique. Douloureux. Ou en es-tu dans ta vie privee ? As-tu un conjoint ? Un enfant ? Une situation professionnelle stable ou promettante ? As-tu suffisamment de temps et de courage pour tenter de lui venir en aide ? C'est a toi de voir. Dans la vie, il faut savoir aussi assurer ses arrieres.

Dans un premier temps, et si " tout est fini ", tu peux l'appeler regulierement et lui dire la verite progressivement. Il compte pour toi mais tes occupations te prennent deja beaucoup de temps. S'il n'est pas a meme de comprendre, que sa maladie le perturbe trop, detaches toi de lui. C'est peut-etre mieux pour toi. Tu as deja tant donner !

Cordialement.

Felipe.

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sergi (90 messages) Envoyer message email à: sergi Envoyer message privé à: sergi Voir profil de ce membre Voir addresse IP de cet auteur
13-05-04, 15:20  (GMT)
3. "RE: coupable,mais de quoi?"
Bonjour Taninou,

Merci pour ton témoignage choc, c'est le moins que l'on puisse dire.
Tout ce que tu as fait est une belle preuve d'amour.
Je ne me permettrai pas de te dire quoi faire, sinon de suivre ce que tu juges le mieux pour toi, mais aussi l'appel de ton coeur.
Bien amicalement.
Sergi

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