Bonjour,Je souhaiterais apporter un témoignage.
Je pense souffrir de déréalisation, depuis des années déjà.
Mettre des mots dessus n'est pas facile. Quand j'essaie d'en parler, je l'évoque en général en ces termes :
- Je vois la réalité comme à travers un brouillard qui donnerait un caractère suréaliste à une scène. Comme dans un rêve. Les émotions s'estompent au travers du brouillard...
- Je suis obligé de faire une démarche intellectuelle pour me dire que j'existe et que les choses qui m'entourent existent. Ce n'est plus implicite, immédiat.
- Je me sens souvent extrêmement loin des gens et de moi-même, y compris de mes proches... (ce qui est très culpabilisant).
- Une impression de flottement permanent
- etc...
Je n'ai découvert le terme de "déréalisation" qu'assez récemment. Il correspondait remarquablement à ce que j'éprouvais.
J'ai lu que l'on considère plutôt cela comme un symptôme de maladies comme la schyzophrénie, les crises d'angoisses...
Dans mon cas, j'aurais plutôt tendance à considérer cela comme une maladie à part entière, qui serait entrée insidieusement en moi au fil des années.
L'année dernière, j'ai été suivi par un psychiatre pour dépression. J'ai pris également des anti-dépresseurs légers. Je me suis senti un peu mieux sur le plan de l'humeur générale, mais aucun effet sur cette déréalisation. C'est quelque chose qui me semble important : je peux me sentir relativement bien dans ma peau et pourtant être extrêmement loin de ce qui m'entoure. Mais je pense que c'est surtout lié au fait que j'ai appris à vivre avec.
C'est de plus en plus rare, mais parfois je reprends une conscience "intuitive" de la réalité. Il s'agit d'une discontinuité dans ma perception de moi et de mon environnement : brusquement, un basculement se produit et je me mets à ressentir les choses "normalement". Quand ça arrive, ça ne dépasse guère une minute mais c'est poignant et c'est beau, ça me redonne un peu d'espoir. Cela dit, de l'espoir je n'en ai plus beaucoup et mon état actuel est plutôt celui d'une douce résignation. Je vis avec, mais la vie n'a plus la même valeur pour moi. Je considère avec indifférence l'idée de ma propre mort.
Je lutte pour les gens qui me soutiennent et qui m'aiment. Je lutte contre ma démotivation, mon envie de me laisser aller complètement, de me coucher dans le caniveau.
Les évènements qui me font "revenir à la surface" sont généralement extra-ordinaires, par exemple un accident qui se passe sous mes yeux, ou quand quelqu'un se met à me parler d'une manière totalement décalée. Si je me donne une giffle forte, ça peut aussi me remettre en place pour quelques secondes. En fait, je crois que ça m'arrive suite à un évènement qui me remet en perspective par rapport à mon environement. Un peu comme un réveil qui en sonnant me rappelle que je suis là, me replace dans le temps et dans l'espace, maintenant et ici.
J'éspère que mon témoignage pourra apporter quelque chose.
Je peux en parler plus... Ca m'aiderait peut-être aussi.
Merci
PS 1 : j'ai 28 ans ; je ne prends pas de canabis ou autres...
PS 2 : je pense aller consulter un neurologue en esperant qu'il m'apporte un éclairage nouveau. Mais j'ai peur qu'il ne me comprenne pas, qu'il ne soit pas informé de ces problèmes, et me renvoie directement chez un psychiatre... Mon experience de la psychiatrie ne m'a pas apporté grand chose mais peut-être suis-je mal tombé, comment savoir ?