Bonsoir Daniel,C'est un vaste, très très vaste sujet de discussion. C'est en fait la confrontation de nos réactions par rapport à la schizophrénie de nos proches, c'est le coeur du volcan de notre douleur.
Et dans la vie, sans que cela soit "la faute" des uns et des autres, il y a quand même des "forts" et des "moins forts".... D'où mon irritation éternelle devant les "y faut que, y'a qu'à".
Moi, voyez-vous, je me suis "complètement écroulée" APRES les crises les plus fortes de mon fils aîné, tant et si bien que celui-ci et moi-même avons été hospitalisés,quasimment en même temps,, à un jour de différence : lui le dimanche soir en psychiatrie générale, moi le lundi matin dans le secteur "ouvert" des dépressifs. Il est resté hospitalisé trois mois, il est sorti "ressucité" (momentanément hélas !) AVANT MOI !! et moi, le 4ème mois, j'ai été expédiée en province, à 800 kms, pendant un mois supplémentaire pour essayer, justement, comme je le racontais à Martine, de me "décoller" de mon enfant.
Du jour au lendemain, mon "petit", mon second, le deuxième amour de ma vie, s'est retrouvé tout seul : frère et mère en HP, d'un seul coup,après tout une série épuisante (euphémisme...) de confrontation avec la schizophrénie du grand. Et puis après, c'est lui qui a dû signer les hospitalisations qui ont suivi, en HDT de son frère, car je ne pouvais pas le faire, çà me "rendait folle".... Et pourtant il y allait de la vie de mon enfant....Comment comprendre cela, comment l'admettre d'une mère ?
Est-ce que je suis un monstre ?
Heureusement, je l'avais, lui, mon deuxième...Et grâce à lui, Nicolas donc, son aîné, n'a jamais été seul. Au jour d'aujourd'hui, Christophe a toujours autant d'humour (c'est un "rigolo", un "blagueur" de naissance), n'empêche que je sais pertinemment qu'il a été très profondément touché, "atteint" et que, dans quelques années, quand je serai enfin devenue "forte"(je "me" travaille tous les jours pour essayer d'y arriver), ce sera à moi de le protéger, de l'aider, car, je suis bien persuadée qu'il ne sortira pas indemne de tout cela. Tous les psy que nous avons rencontrés et avec qui il parlait de son frère lui ont tendu "grand les bras", si je puis dire, puisqu'à chaque foisqu'il avait eu à s'occuper de son frère, ils ne manquaient jamais de lui dire que le CMP lui était ouvert à lui aussi pour quand ce serait trop lourd à porter : il n'a JAMAIS voulu parler de lui, de sa propre souffrance. La seule chose dont je me souviendrai toute ma vie c'est que lorsqu'il a vraiment réalisé la maladie de son frère,en novembre 1998, il s'est effondré par terre en sanglotant et en me disant "il était mon héros, Maman, il était mon héros"...(Ils ont 5 ans de différence) Lui aussi, je l'aime plus que tout au monde, mais voyez-vous, je crois que sa force à lui c'est de savoir dire "NON". Et il sait le dire, croyez-moi, il sait le "hurler" même, "à moi, sa mère !!!" (Je plaisante).Il nous arrive -expression "triviale" (?), mais bien parigote,(et re-pardons...) de "nous engueuler comme du poisson pourri", ou, pour être -quand même plus polie, on se dit nos quatre vérités sans aucun ménagement et il me dit "NON".... alors que son frère et moi savons beaucoup plus dire "OUI" tout le temps et que le "NON", si salvateur parfois, est une torture pour nous....
Cela dit, je sais que ce vécu-là de sa jeune vie est inscrit à jamais dans sa mémoire et je jure que je vais faire tous les effort qu'il faut pour devenir enfin "forte", car, un jour il faudra qu'il s'appuie sur ma force aussi.
Le plus dur métier du monde c'est bien celui de "parents". Certes, nous avons des devoirs, mais nous sommes chargés aussi d'un passé, d'un "héritage" familial que nous n'avons pas choisi et qui sont encore plus lourd à porter quand on n'a pas reçu l'éducation chaleureuse et compréhensive des parents "plus forts"... C'est pour cela qu'il faut se battre et ne pas avoir "honte".
J'ai peur pour l'équilibre de mon deuxième fils, çà, c'est vrai, et ma petite tête de piaf fait déjà très attention à ses comportements, mais je n'ai pas honte d'avoir eu si mal, si mal et de ne pas avoir su dominer ma souffrance comme tant d'autres parents savent si bien le faire. Ma mère était maniaco-dépressive,une de mes tantes maternelle souvent hospitalisée à Sainte-Anne à Paris aussi, mon cousin germain, du côté paternel, est maniaco-dépressif, ma cousine germaine, aussi du côté paternel est maniaco-dépressive ainsi que son propre père !! Tout ce petit monde en a vu de toutes les couleurs et toutes et tous y sont allés de leurs hospitalisations multiples....(Le lithium dans la famille, on connaît !!)
De mon côté, j'essaye de faire du plus que je peux avec ce que j'ai. J'ai la chance d'avoir une psy formidable, c'est elle qui me suit à la trace depuis mon hospitalisation en 2001 et maintenant je suis encore moins seule, puique vous êtes là, si nombreux dans ce forum...
Au revoir....Et merci Daniel pour votre petit mot.
Perrette.