bonjour fanny,je ne pense pas moi, que ta question soit déplacée, et je veux essayer de te répondre en racontant mon parcours, ce qui risque d'être un peu long, mais parce que je pense moi aussi, comme toi qu'à certains moments l'alcool m'a aidée, avant de devenir un handicap.
Je sais qu'à la base mon problème vient du fait que j'ai une personnalité trop émotive et hyper-sensible, mais bon je suis née comme ça et je sais maintenant que je ne la changerais pas.
à 12 ans j'ai fais ma première tentative de suicide, j'étais en 5ème, loupé heureusement, mais j'ai alors commencé à fumer, une façon en quelque sorte de mettre un écran (de fumée) entre soi et les autres pour se protéger.
à 15-16 ans, mes amis s'amusaient, rigolaient, voyaient la vie simple et pleine d'espoir, moi je pleurais en pensant aux malheurs du monde, aux enfants qui mourraient de faim ou que l'on battaient, j'été envahie par une immense compassion pour le reste du monde, et j'enrageais de mon impuissance à ne pas pouvoir y changer quoique ce soit, j'étais révoltée par l'injustice et la cruauté des hommes et de la vie. Mais bon, qui aurait eu envie d'avoir une copine aussi triste et pessimiste, alors je me suis aperçu qu'avec quelques verres, j'oubliais tout ça, et j'étais drôle et d'agréable compagnie, et j'avais pleins d'amis... cela a commencé comme ça mais c'était encore peu fréquent, seulement les sorties avec les copains.
à 17 ans en 1983, problèmes familiaux, je me fâche avec mes parents, je pars de la maison, pour faire mes études dans une autre ville et ne rentre donc plus ni pour les week-end, ni pour les vacances. Comportement buté d'adolescente, je sais, mais malgré tout je souffre terriblement de la rupture, de la solitude, de la peur de l'inconnu, du manque de moyens financiers, donc deuxième tentative de suicide, et alors là c'est la dégringolade et le refuge dans une alcoolisation quotidienne. je termine malgré tout mes études en 85 et me retrouve au chomage, de pire en pire... suis 3 ans de vie de patachon faite de petits boulots minables, de cuites terribles, de problèmes en tout genre, souvent liés à ma consommation excessive, pas d'argent, interdiction de chéquiers, agressions (sur ma personne) car certains savent trés bien repérer les personnes faibles...enfin bref l'enfer !!!
en 88, je sens que la troisième tentative est trés proche et que ce coup ci je ne me louperais pas, car je n'ai plus personne autour de moi qui pourrait intervenir à temps pour me sauver. je vais donc de moi-même demander "au secours" à un neuro-psychiatre qui vu mon état ne me laisse même pas ressortir de son bureau et me place en clinique. désintox, traitement de choc au niveau médoc. et une psychothérapie. je ressors et reste abstinente pendant 5 ans de 89 à 94. mais une abstinence malheureuse, je m'y suis sentie contrainte et forcée, pour tenir j'ai déménagé, coupé les ponts avec toutes les personnes que je connaissais, je ne sortais plus, je me retenais tout le temps, je m'ennuyais ferme, plus envie de rien. en 93 ma fille née, un rayon de soleil dans ma vie, mais cela dure un an. en 94 je reprends un verre de temps en temps, le stress , la fatigue, l'envie de recommencer à m'amuser..cela dégénère vite.
j'ai peur de recommencer trop de conneries et puis j'ai ma fille alors j'arrêtes à nouveau debut 95. en 96 mon fils né, deuxième rayon de soleil.
97 de nouveau stress, professionnel, avec mon mari, gérer 2 enfants, la maison , le boulot... je repique une nouvelle fois...mais en même temps j'entame une psychothérapie (que je suis toujours avec la même personne à l'heure actuelle), pendant 3 ans je gère assez bien ma consommation, cela me permets de décompresser, d'être moins sensible, encore une armure entre moi et les autres, cela me permets de m'extérioriser davantage et de passer outre ma timidité. en plus j'ai l'alcool gai et chaleureux, et si je dépasse vraiment la dose, je ne fais pas d'esclandre, je m'endors donc cela passe assez bien avec mon entourage. en 2000 de nouveaus amis, qui boivent beaucoup et là c'est l'escalade, c'est vrai que les alcooliques attirent les alcooliques, comme on dit qui se ressemble...
je commence à avoir des sentiments de culpabilité, des matins plus que difficiles, des signaux d'alerte physique, quelques accrochages en voiture heureusement toujours trés mineur, et toute seule, juste un peu de peinture rayée....mais je me dis que parfois je rentre et je ne souviens pas du tout de la route que je viens de faire...enfin bref cela devient un problème.
pendant les 3 années qui suivent j'essaie de reprendre la maîrise de ma consommation, période de diminution, jamais de jours d'abstinence totale pourtant, puis re-augmente, je travaille à fond avec mon psy pour analyser les raisons de cette alcoolisation, avec lui j'apprends à mieux me connaître, à accepter mon hyper-sensibilité, à apprendre à la gérér, à apprendre à évacuer mon stress par d'autres méthodes, à améliorer mon rapport avec les autres pour pouvoir leur parler sans avoir peur et donc sans avoir besoin d'un verre pour le faire, à me protéger des personnes qui ont des problèmes et qui aiment beaucoup me parler car j'écoute bien mais absorbe leurs problèmes comme une éponge, il m'appelle une "poubelle énergetique", eux vont mieux aprés et moi suis toute cassée..
une fois toutes ces étapes passées, je me dis: il me reste quoi comme gros problème ? et bien il m'en reste essentiellemnt un et c'est l'alcool !
la goutte d'eau (de bière ?) ou le déclic c'est une échographie qui m'apprends que mon foie à morflé, et là je me dis STOP, c'est trop con maintenant que j'ai parcouru tout ce chemin, que je n'ai plus d'idée suicidaire, que je me sens mieux dans ma peau c'est pas maintenant que je vais mourrir !
Alors je me suis lancée (à l'eau)et me suis dis que c'était devenu ma priorité n° 1. Aprés le reste , mes émotions, ma sensibilité on verra bien, je me sens plus prête à arriver à le gérer. Et cette fois-ci je veux vivre une abstinence heureuse (contrairement à la 1ère), donc je n'ai pas coupé les ponts avec mes amis mais je les ai informés de ma décision, pour qu'il ne me tente pas.même chose avec mon mari.
et pour finir cette longue histoire, j'ai même gardé un pack de ma bière préférée dans mon cagibi, car je ne veux pas me dire, je ne bois pas parce que je ne PEUX pas, j'en ai pas, mais je me dis , je ne bois pas parce que je ne VEUX pas. énorme différence pour moi....
j'espère ne pas vous avoir trop ennuyé mais je sais pas pourquoi aujourd'hui, 4ème jours d'abstinence, j'avais envie de raconter ma vie, et comme toi fanny l'alcool m'a aidé à supporter des moments de ma vie, où je me serais surement tuée sinon, mais maintenant, je sais que c'est lui qui me tuera si je n'arrête pas.