Modifié le 08-11-04 à 13:49 (GMT)Bonjour Pandore
Je ne voudrais pas que cette discussion dérive et risque d'être fermée, mais dans un salon sur l'éthique médicale, je voudrais quand même vous mettre en garde contre des notion aussi floues que la jugeote et le bon sens, car chacun peut les reprendre à son compte :
le bon sens est de ne pas donner un produit à addiction pour guérir d'une addiction à un produit, non ?
La France a attendu 1985 pour autoriser les traitements de substitution (méthadone, en centres spécialisés), puis 1995 pour autoriser les médecins généralistes à prescrire du subutex. Remplacer une addiction à un produit dangereux grâce à un produit présentant une addiction fut aussi l'occasion d'un débat acharné ou l'on opposait le bon sens, le pragmatisme, la légalité, le sens moral, ou la jugeote était qu'après tout il suffisait de laisser un toxicomane enfermé dans une pièce pendant quelques jours pour qu'il "décroche" de l'héroïne... On l'entend encore...
Bien que les effets indésirables soient connus et que le subutex soit ainsi devenu le 11 eme médicament le plus remboursé, sans compter les détournements pour usage comme toxicomanie, il n'en demeure pas moins que cette politique de santé publique a portée ses fruits, comme le rappelait entre autre Mr Mattei devant le Sénat: http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/33_030423jfm.htm
Quelques médecins avant ces dates prescrivirent pourtant ces traitements dans l'illégalité la plus totale à des toxicomanes, pour les sauver. Il me semble qu'ils suivaient une éthique personnelle basée sur le couple bénéfices/risques et une logique, un pragmatisme, un respect de l'autre qui allait bien au delà de cette valeur floue qu'est la jugeote.
Il est bien entendu que les traitements de substitution font partis d'un ensemble de prise en charges, psychologiques et sociales, qui s'appuient sur une infrastructure de soins et une démarche globale.
Par contre, il ne faut pas oublier que c'est en regardant à l'époque ce que faisaient nos voisins précurseurs en ce domaine que la situation a évoluée dans notre pays, et qu'aujourd'hui encore, des voisins vont plus loin que nous, ce qui m'a poussé à faire mon poste sur l'Atu.
la légalité a des frontières, des cultures et des époques, la science me semble plus universelle, ne serait ce que parce que l'organisme humain est le même partout...
Le plus farouche opposant au marijuana tax act fut l'AMA , l'association médicale américaine, pour défendre les usages thérapeutiques de cette plante, et ce ne fut qu'après des milliers d'emprisonnement de médecins qui continuaient à prescrire une plante devenue "illégale", qu'elle fini par baisser les bras vers 1939 et se plia à la doctrine officielle.
L'inquisition espagnole pourchassa "l'herbe du diable", dont l'usage psychotrope avait été introduit semble-t-il par les invasions arabes, (Mahomet avait interdit l'alcool et autorisé le cannabis) et 2 siècles après, en 1484, le pape Innocent VIII en déclara sacrilège son utilisation dans la bulle "Summis desiderantis", dans laquelle il organisa la lutte contre la sorcellerie. Si la "chasse au sorcière" ne dura "que" jusqu'au XVIII eme siècle, heureusement pour ces malheureuses brûlée vives, on peut se demander si elle ne continue pas d'une certaine façon en ce qui concerne cette plante... 
amicalement
pourquoipas@walla.com