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Journée mondiale contre la maladie d’Alzheimer
Le 21 septembre 2007 aura lieu la journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer.
Première publication : lundi 3 septembre 2007,
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Le 21 septembre 2007 aura lieu la journée mondiale de lutte contre la maladie d’Alzheimer. Mascarade ou véritable manifestation scientifique ?
Noble cause que celle de lutter contre le naufrage de la pensée.
Longtemps, on a parlé de gâtisme ou de démence sénile pour décrire la maladie des vieux qui perdaient la tête. La maladie d’Alzheimer concernait les déments précoces, touchés à la soixantaine, voire plus tôt.
Mais maintenant, tous ceux qui perdent la mémoire ont la maladie d’Alzheimer, c’est plus chic.
Plus chic et surtout plus rentable. Cette "démocratisation" de la maladie d’Alzheimer est contemporaine de la commercialisation de médicaments censés freiner la maladie : selon le Monde du 3 août 2007, la dépense en soins médicaux pour un malade Alzheimer oscille entre 8500 et 12000 euros par an, et celle en "accompagnement paramédical" entre 8000 et 11500. Cela fait vingt mille euros par an qui sont à la charge de la collectivité.
Malheureusement, ces médicaments ruineux sont d’une efficacité modeste (pour ne pas dire inexistante) sur la maladie, tandis que leurs effets indésirables sont redoutables et parfois mortels. Leur bilan global est négatif et j’améliore beaucoup mes patients en leur arrêtant ces médicaments prescrits par des confrères spécialistes.
Pire, en captant les ressources financières disponibles, ces médicaments privent les malades de ce qui est réellement important pour eux : soutien aux familles, aides et aménagements à domicile, hébergements décents.
L’industrie qui commercialise les ARICEPT, EXELON et autres EBIXA joue son rôle de commerçant et finance massivement associations de patients et de médecins, congrès, manifestations scientifiques.
Tout est bon pour inciter les français à consulter, et les médecins à prescrire ces médicaments que beaucoup de médecins ne donneraient pas à leurs propres parents.
Les services de gériatrie sont devenue de véritables usines à prescrire ces médicaments, et sont souvent liés financièrement aux industriels qui les commercialisent.
Pas un gériatre ou presque ne participe à un congrès sans y être invité par un laboratoire pharmaceutique qui veillera à faire passer les bons messages grâce à des leaders d’opinion qui sont à l’industrie du médicament ce que Claudia Schiffer est à L’Oréal. De plus, il faut se mettre à la place de ces spécialistes longtemps cantonnés à la gestion des interactions médicamenteuses, des incontinences et des handicaps irréversibles : voilà enfin une cause qui les valorise, qui leur assure des financements et une médiatisation de leur action. Il ne s’agit pas uniquement de lucre bien sûr, mais du rêve auquel tout le monde veut croire, qui voudrait qu’un peu de chimie pourrait ralentir le déclin cérébral et améliorer les patients sans effets collatéraux.
Bref, il ne s’agit pas de jeter l’anathème sur les "consultations mémoire" et les gériatres, mais de s’inquiéter d’une intrusion massive de l’industrie et de ses objectifs financiers légitimes, dans le champ de la médiatisation de maladie et de la formation des médecins. Le dépistage par exemple, dont on nous rebat les oreilles n’a aucun intérêt dans la maladie d’Alzheimer, faute de possibilité de la ralentir sans risque. Tout au plus génère-t-on des inquiétudes injustifiées ou apprend-on un peu plus tôt que l’on va bien mal finir ses jours...
Mais face à ces inquiétudes, il y a une bonne nouvelle : le Pr Joël Ménard vient d’être confirmé à la tête de la commission installée par Nicolas Sarkozy pour mettre en place le plan Alzheimer. Bien qu’il ait été Directeur Général de la Santé, le Pr Joël Ménard n’est pas un politique. Je ne le connais pas personnellement mais j’ai suivi son parcours : c’est un vrai scientifique et un homme de grande qualité. Je ne peux croire qu’il soit capable de composer avec des intérêts industriels, liés ou non à l’UMP. C’est donc avec beaucoup d’intérêt que l’on suivra les travaux et communications de cette commission. A moins bien sûr qu’il fasse qu’un passage éclair dans cette mission.
Cette campagne pourrait être l’occasion de vérifier l’application de l’article 26 de la loi de 2002 dont les décrets d’application sont parus au printemps. Cette loi prévoit que tout professionnel de santé qui s’exprime en public soit faire état préalablement de ses conflits d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique. Une routine aux USA, mais une petite révolution en France qui tarde à se mettre en place. |
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